A deux pas de la place Tian’anmen, Hip Hop Citoyens a piloté l’une des toutes premières opérations graffiti dans l’espace public au cœur de Pékin en collaboration avec l’Académie Nationale de la Peinture en Chine et Beijing Fun, « COLORS by Paris Hip Hop at Beijing Fun ».
Sept artistes internationaux sélectionnés par Hip Hop Citoyens ont peint près de 600 m2 de façades de bâtiments dans le tout nouveau quartier « Beijing Fun » du 31 octobre au 8 novembre 2017. Des conférences et rencontres autour du hip-hop, des workshops ainsi que des DJ Sets et un battle de danse ont ponctué ces 10 jours d’échanges artistiques.
L’appropriation du graffiti par les institutions culturelles chinoises est une nouvelle preuve que celui-ci se pose comme l’un des courants artistiques contemporains les plus dynamiques et les plus diffusés à l’échelle mondiale. Au travers de l’initiative « COLORS by Paris Hip Hop at Beijing Fun », la Chine positionne officiellement le graffiti aux côtés de grands noms de l’art contemporain international qui seront également amenés à exposer au « cœur » d’un Pékin réinventé.
C’est donc pour son expérience dans l’élaboration de projets internationaux d’envergure – dont le festival francilien de référence Paris Hip Hop associant graffiti, danse, musique, conférences ou cinéma – que la prestigieuse Académie Nationale de la Peinture en Chine a sollicité Hip Hop Citoyens dans ce projet hors norme. La principale réalisation était celle d’une œuvre graffiti monumentale associant l’artiste parisien DA CRUZ, son confrère grenoblois NIKODEM, le Chilien FAKIR, le Brésilien Bruno BIG et les artistes chinois RAY, M53 et CER. Étaient aussi de la partie pour assurer les soirées DJ Sets, le Français EWONE et son comparse chinois FLVCKO ainsi que R-ASH pour une performance surprise de scratch.
Après plusieurs mois de préparation, les équipes de Paris Hip Hop se sont envolées fin octobre pour Pékin à la rencontre de leurs partenaires chinois. L’emplacement exceptionnel de ce nouveau quartier en plein cœur de la capitale et à quelques pas de la place Tian’anmen n’aura pas rendu les choses faciles tant le lieu est stratégique et jouxte le cœur du pouvoir politique chinois. Le timing coïncidant avec la clôture du XIXème Congrès du Parti Communiste Chinois aura eu aussi ses incidences et rendu les discussions plus politiques.
Face à une Académie Nationale de la Peinture Chinoise curieuse des nouvelles formes contemporaines mais légaliste et fidèle au classicisme pictural inscrit dans la culture du pays, il aura fallu expliquer l’intérêt majeur de peindre désormais dans la rue avec cette nouvelle scène d’artistes contemporains.
Il faut dire que chaque représentation picturale dans l’espace public pouvait potentiellement être signifiante et représentative d’une imagerie hors des cadres strictes imposés par les enjeux d’un tel projet.
Inédit d’un point de vue artistique, prestigieux par sa position géographique, susceptible de perturber les réputations, toujours fragiles, de personnalités chinoises institutionnelles et privées associées à cette opération tant le timing politique était particulier avec l’élection du Président chinois Xi Jinping et sa nouvelle vision d’une Chine fière et décomplexée.
Pédagogie institutionnelle, tact, diplomatie et maîtrise de soi auront permis de construire un projet d’une ampleur inédite avec nos interlocuteurs chinois de haut rang, dans un lieu exceptionnel, imaginé comme un carrefour entre tradition et Chine de demain.
Chacun aura pu « garder la face » et le rendu des fresques sur les façades de Beijing Fun aura mis tout le monde d’accord. Des contraintes, le milieu du hip-hop et les streets-artistes savent en faire une force, une ressource permettant de proposer des œuvres, en prise directe avec leur environnement, à la fois respectueuses et impertinentes.